Questions à … Françoise et Laurent Le Mézec (maraîchers à Plourhan)
De la Terre à la mer
Les actions et gestes que nous effectuons sur la terre se terminent toujours à la mer.
Nous avons rencontré deux maraichers, Jean-Luc Le Goalec de Plérin et Françoise et Laurent Le Mézec de Plourhan afin qu’ils nous expliquent leur métier.
Voici le témoignage de Françoise et Laurent Le Mézec de Plourhan (partie 2)
A 23 ans tous les deux, après un long voyage à vélo en Europe du sud, nous nous installons en agriculture en 1983, sur 8 hectares en location au village du Roha (situé à cheval sur les communes de Pléguien et Plourhan).
Nous y plantons un verger de kiwis (1 ha) et produisons des choux-fleurs, cocos, céréales, auprès d’un petit élevage de porcs, vite remplacé par des serres tunnels.
En 1987, un ouragan détruit nos serres neuves, et notre verger est très endommagé. Nous reconstruisons nos installations à la hâte, puis reprenons les terres des parents de Françoise ; nous cultivons en tout 25 hectares sur la ferme du Roha.
La production est alors dirigée vers les coopératives, qui nous imposent des cahiers des charges draconiens : calibres, aspect, normes, traitements chimiques préventifs et nombreux, dans un contexte de marchés instables et aléatoires, notre marchandise étant parfois déclassée, voire refusée. Notre revenu est insuffisant pour nous et nos quatre enfants.
En 2000, nous quittons ce modèle inhumain pour convertir notre ferme à l’agriculture biologique. Dans ce milieu, nous rencontrons des agriculteurs heureux, et un système commercial différent (nous vendons à des négociants, et la demande est forte), les contacts sont plus humains.
Les coopératives sont toujours à nos trousses, et nous poursuivent en justice, car elles estiment que nous leur devons des cotisations. Nous menons un combat avec d’autres producteurs, et nous avons gain de cause (grâce à l’Europe). Nous voilà enfin indépendants.
En 2004, nous aménageons un petit magasin à la ferme, la clientèle est au rendez-vous tout l’été. Devant ce franc succès, nous ouvrons rapidement notre magasin toute l’année, et étoffons notre gamme de légumes (plus de 40 produits différents).
Notre fille Maïwenn nous rejoint en 2019, comme salariée, après un BTS à l’école de St Ilan et des voyages à l’étranger : Nouvelle-Zélande, Thaïlande, Angleterre… 4 ans plus tard, elle s’associe avec nous.
A l’heure de la retraite nous laissons la ferme à Maïwenn, qui construit un magasin plus spacieux, augmente et diversifie la production, embauche deux salariées (3 en été), et s’associe avec Joséphine, originaire du Nord de la France, qui était auparavant en stage de parrainage à la Ferme du Roha avec nous pendant un an et demi. Les deux associées ont 32 ans.
Aujourd’hui notre transmission est faite, et nous sommes heureux de voir la ferme familiale prendre de l’ampleur.
D’autres produits sont présentés au magasin : un producteur livre sa viande (porc, bovin), une chevrière ses fromages, et 2 paysans-boulangers leurs pains, on y trouve aussi des œufs, tisanes, miel, etc …
Au fil de l’année, des animations viennent se greffer au magasin à la ferme : Marché de Noël, foire aux plantes, guinguettes et concerts les vendredis d’été.
Quant à nous, nous profitons de notre temps libre : vélo, randonnées, guitare, chansons, et nous donnons quelques concerts sous le nom de « Papillon noir ».
Laurent et Françoise Le Mézec
Propos recueillis par Annie Le Breton.